mercredi 7 décembre 2011

VENEZIA BIENALE 2011 1°PARTE

La Biennale de Venise 2011


Qu’est-ce que la biennale de Venise? Un concentré des projets artistiques les plus …comment dire?… bouleversés. Cet évènement est censé nous donner la température du niveau de créativité d’aujourd’hui et son potentiel d’expression suivant les propositions d’un vaste panorama de pays. Trois parties sont au programme: Les jardins, « i giardini », où les pays privilégiés ont leur propre pavillon, ensuite l’Arsenal qui est un vaste melting-pot d’art qui pointe , et enfin les expositions individuelles disséminées dans les plus intrigants recoins de la ville flottante…


1° partie : Les Jardins…ou l’art contemporain officiel

De mémoire nous avons commencé, chauvins, par la naissance: Au pavillon français, Christian Boltanski nous plonge dans une usine à bébés présentée comme un chaîne d’imprimerie où défilent des milliers de photos de nourrissons. Une longue bande de nouveaux-nés qui défile dans un labyrinthe d’échafaud-âges. Le visiteur déambule dans la production de la vie de notre planète, combien de naissances et de décès. Environ 240 000 vies gagnent sur la mort chaque jour…Nous voici donc dans ce système froid de presse à bébés qui passent aux rouleaux mécaniques. Ils sont presque tous identiques, " vierges de toute expérience, mais pourtant ils connaîtront tous un sort différent " Le destin…

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Le destin qui a voulu que l’artiste sélectionné pour l’Allemagne meure d’un cancer du poumon non fumeur juste avant la biennale! Christophe Schlingensief nous a légué son image en héritage: un symbole vivant d’énergie et de volonté qui sont les deux grandes balises de celui qui souhaite faire entendre son message. Cet artiste nous aide à réfléchir sur notre aptitude à nous imposer en art tout en gardant une grande humilité. R.I.P.
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Et c’est peut-être en résolvant ce problème d’ego et celui du pouvoir que l’on parviendrait à vivre dans un monde de paix. Le pavillon coréen est tout bariolé d’uniformes en fleurs et de vidéos où des soldats manœuvrent invisibles dans une jungle de fleurs champêtres. FLOWER POWER!



Lee Yongbaek attaque la question du système et de ses institutions avec ce beau symbole du mannequin qui se révolte contre son propre moule ! Et cette vision de la piéta ou un autre grand moule blanc berce son enfant rose endormi, anesthésié plutôt! Il faut se réveiller avec fracas comme dans ces vitres miroirs vidéo qui explosent en mille morceaux brisés criblés.
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C’est l’émotion qui règne au pavillon tchécoslovaque (à Venise la sission n’est pas encore faite!). Dominic Lang fait revivre la sculpture de son père, il l’exhume dans les plus grands honneurs. Un travail de plâtres timide et inerte depuis longtemps délaissé est réveillé dans cette reconstitution poétique de l‘atelier. Les sculptures, avant poussiéreuses, prennent une nouvelle tournure. Cette œuvre, comme inachevée trouve ici un nouveau dynamisme, une destination. Des fragments, des reconstitutions, des perspectives sont collés dans un espace nouveau qui dresse un pont magique entre le présent et le passé. Une poignante mise en scène qui nous immerge dans cet espace du travail artistique (un peu comme la visite de l’atelier de Brancusi). Les meubles font aussi partie de l’installation, ils se mêlent intimement aux statues de plâtre comme cette table qui entoure un nu, cette armoire qui protège l’intimité de quelques ébauches planquées…



Ce qui manquait à tout ce petit monde c’était sans doute un cadre….Celui de l’hommage d’un fils à la mémoire de son père, à la beauté de nos racines…
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On vit dans un monde fragile! Le saviez-vous? Ici à Venise c’est la neutralité qui nous le dit: la Suisse avec le haut parleur Thomas Hirschhorn. « Establishing a critical corpus » est un travail collectif de très haut niveau en termes de critique sociopolitique. On vit dans un monde de cristal…mais la beauté du quartz et ses qualités dynamiques, protectrices et spirituelles semblent avoir été perdues de vue (dans l‘installation les cristaux ont curieusement noirci). Ce ne sont aujourd’hui plus que des piles industrielles, des blocs de silice qui alimentent un monde de pacotille. Trop de lumière aveugle! Nous n’y pensons plus, nous sommes enfermés dans une caverne, un purgatoire, ébloui par une lumière médiatique trop intense qui reflète un monde surfait. Carton, alu, plastic qui nous entourent dans cette omniprésence compulsive de l’emballage. Moche! La ruine de notre société.
Si comme dans cette installation-grotte emballage on nous montre du doigt les atrocités commises aujourd’hui, comment réagissons-nous? Comment réagissons nous aux mutilations dont souffrent les victimes de ces violences? Au niveau médiatique tout est transféré sur un autre plan mais qu’advient-il si le public est confronté à cette violence réelle dans une installation artistique ? Continue-t-il à n'être qu'un voyeur impassible voire blasé, ou cela peut-il l'amener à voir enfin les évènements autrement?
Tout une réflexion sur la transparence et sur l’opacité…

Les médias emballent et ces artistes suisses déballent la vérité ?
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En Israël on fait un gros blocage sur les idées. Un pavillon entier rempli de tubulures qui se dispersent…nulle part après avoir puisé, pompé les sols !!! On puise ou on s’épuise ? Le principal est de ne pas « pomper « !



Apparemment, en Israël, il vaut mieux parler de sous-sol parce que le problème du sol est un peu plus électrique. Mais enfin il y a une vidéo sur ce thème: Politically correct oblige. Bref on ne sait plus tellement sur quel pied danser et les baskets sont restées congelées !
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Et le grand pavillon ?

Llyn Foulkes

Le sacro-saint temple de l’Art de pointe (ce pavillon rassemblerait la crème de la crème comme on dit en Gourmandie) est cette fois-ci un peu déroutant, comment dire.... léger…on marche sur la tête!
Comme ce char d’assaut retourné dont les chenilles sont animées par le piètre effort d’un jogger sur un tapis roulant juché…des bouts de pâte à modeler à disposition du public, des pigeons empaillés partout, des chaussettes prisonnières entre deux rochers, un bambou érigé, un bac renversé avec de la cire figée, une vidéo figée de la pleine lune….



Bref il semblerait que la mode soit à cheval entre le post-néo-dadaïsme et le je-ne-sais-pas-quoi-fairisme…pourtant nous sommes vraiment ouverts, mais là !?!?! Ca gondole sec!
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Une petite note tranquillisante en Grèce avec une installation adaptée aux circonstances économiques: Un passage, un pont au milieu d’un pavillon rempli d’eau. Inondé mais paisible grâce à cette musique planante qui nous transporte et nous permet de souffler, de

décompresser!
Rien d’autre…« dégrèçage » maximum !

Ndlr: la naïade vient en extra!

Texte et photographie de Morgan & Laurence Louisfert

mardi 6 décembre 2011

VENEZIA BIENALE 2011 2°PARTE

2° partie : L‘Arsenal…la grande enfilade de toutes les surprises

Vous entrez dans un labyrinthe de placards. Des portes de placards pour toute introduction. Qui est au placard? Pas commode à savoir! L’art qui placarde ou le public au rencard? Je ne sais pas. Toute une installation grand-mère du siècle passé, où sommes nous? De ces meubles on ne garde que la porte; ce n’est pas l’intérieur qui compte! C’est la façade, recto et verso, comme pour ne pas aller au-delà des apparences. C’est une ambiance sans saveur ni intrigue. Des rideaux et des miroirs pourtant…l’attraction émotionnelle avec le public est des plus réduites.



!


Mais ouvrez les yeux bon sang! Pour cela on vous plonge dans une salle noire dans laquelle il n’y aurait presque rien à voir. Exactement comme dans la vidéo que l’on vous montre où les gens viennent au rendez-vous de l’art dans une grande salle (blanche cette fois-ci) sans comprendre pourquoi; il ne se passe rien ???

Allez un peu d’émotion que diable! Mais non, admirez cette fusée improbable, un projet chilien qui ne décollera jamais. N'attachez pas vos ceintures. Il faut donc être bien accroché pour ces premières salles qui ne sont pas très aguichantes.

Courage! Bourrage…Rashid Johnson nous réchauffe avec de forts jolis tableaux sculptures en bois marqués au « branding » (tatouage au fer rouge) et calligraphiés à l’encaustique avec quelques touches « asiattisantes » rouges et dorées. Plus accessible déjà avec, pour suivre, 15 sculptures architectoniques faites dans toutes les matières possibles. Ces maquettes du monde nous aident à voyager dans tous les pays et tous les temps. L’artiste s’appelle monsieur oups j’ai oublié et nous prépare à… Franz West.

Je vous laisse le soin de vous documenter si vous le souhaitez sur cet iconoclaste « pas-tantant ». Pour le meilleur et pour le pire, le public se perd, l‘ironie n’est pas flagrante. Dur! Sommes nous venus à Venise pour voir deux chiottards en face d’un lavabo ?

Arrêt soudain: Quel est le nom de l‘artiste ??? L’Œil diverge, l’esprit divague, la raison défaille; nous ne saurions plus distinguer ni l’art du lard, ou le cochon du torchon.


Les artistes se succèdent, se confondent pour former un confortable oreiller soporifique qui anesthésie nos sens et notre âme, je ne souviens plus de rien docteur…

Vient enfin l’exposition des artistes italiens dans un foisonnement assez captivant. L’optique du cru a été de rassembler un grand maximum d’artistes dans trois grands halls. L’Italie nous offre un art non plus conceptuel mais plutôt expressionniste. Un travail qui nous permet de revenir sur nos plates bandes, plus accessible somme toute.




                     Gino Sabatini Odoardi




La petite révolution de cette exposition italienne organisée par Vittorio Sgarbi est: « L’Arte non e cosa nostra » une enquête sur la mafia où comment lever le rideau sur la criminalité au grand public. L’art est aussi une plateforme idéale pour dire la vérité sur notre société et diffuser au grand jour l’infamie mafieuse. Superbe!

L’exposition continue en extérieur dans une belle frénésie de sculptures et d'installations…





La Chine présente Yuanyong dans un lieu exceptionnel: « le magasin des citernes », énorme, une salle des réservoirs de pétrole de l’Arsenal, grosse charge de vieux fers où flottent une belle armada de petites poteries et une vapeur mystique…Traverser ce couloir où une pluie de lettres latines se délitent comme une neige morte alors que les idéogrammes noirs se consolident toujours plus tels des signes qui prendront le dessus.


Et ainsi de suite...on traverse parfois certaines zones obscures, où le jugement s'étouffe, l'attention s'enfuit...c'est fou, tout devient flou

Texte de Morgan et Photographie de Laurence Louisfert

lundi 5 décembre 2011

VENEZIA BIENALE 2011 3 °PARTE

3° partie : Les expositions individuelles, au détour des canaux et ruelles...

Et voici la partie originale de la biennale de Venise.: suivant un plan particulièrement approximatif vous plongez dans les méandres de la ville à la recherche d’expositions individuelles. Les artistes sont le plus souvent présentés sous la bannière de leur pays, mais ils ont le privilège de pouvoir investir un espace qui fait partie du cœur de la cité. Vous allez découvrir des intimités vénitiennes que vous n’auriez normalement jamais connues! Voici un extrait avec ces quelques artistes que nous avons remarqué...


Dans un des nombreux cul-de-sac du quartier Santa Croce, devant une église, sur un parvis du grand canal, Oksana Mas présente une œuvre qui fait le pont entre la renaissance et nos jours; téméraire. Imaginez de grands panneaux couverts de seulement 3.640.000 œufs en bois peints au motif de symboles folkloriques ou icônes classiques de notre société qui dans leur totalité représentent une copie de l’œuvre de Van Eyk « Les Jardins du Paradis ». Ce n’est qu’en reculant que l’on aperçoit l’époustouflante perspective de ces grandes toiles qui totalisent en tout une surface de 134 X 92 mètres! Plutôt bosseurs les ukrainiens…



 Le scenario de Francisco Tropa, portugais, nous présente une poésie visuelle qui change notre perception du temps. Un ancien entrepôt a été rénové et, en lui-même, il nous plonge déjà dans une autre époque. Un éloge est fait à l’élément qui domine Venise, l’eau. Sur plusieurs installations, un rétroprojecteur est placé devant un goutte à goutte qui est reportée sur de grands écrans. Si l’image est inversée, l’eau semble être libérée de toute pesanteur, légère. Très beau. L’ensemble est présenté dans un travail de charpenterie qui inspire le respect.


Au Kyrgystan, on porte un regard très critique sur le monde. Marat Raiymkulov a réalisé des milliers de petits dessins très acides qui nous présentent la condition humaine dans sa plus triste vérité. C’est fou comme de simples silhouettes peuvent nous rappeler notre bêtise, notre aveugle soumission, notre manque de spiritualité! Quand on feuillete ces petits cartons gribouillés, la vie quotidienne de la société moderne nous paraît tellement absurde. Le même ton et efficacité de ce petit homme qui évoluait sur nos écrans en dansant sur une ligne animée dessinée…l'alinéa.




Le Luxembourg a choisi un espace intime, le rez-de-chaussée d'une maison. Cette exposition "Cercle Fermé" est un projet des artistes Martine Feipel et Jean Bechameil et du curateur René Kockelkorn.
Une distorsion de l’espace dans quelques quatre ou cinq salles bouleverse le sens commun de l’équilibre, tout ondule. Les pièces se succèdent dans le blanc, une sorte de grande banquise d'un espace infini qui se reflète dans un palais des glaces. Votre perception est mise à l'épreuve, les meubles ondulent, des mirroirs vous reflètent sans fin, des colonnes son bancales, des chaises molles, le tout dans un décor baroque qui nous enmène dans un autre temps...un chamboulement du lieu très impressionant.


Enfin une dernière artiste digne d'être mentionnée, la géorgienne Tamara Kvesitadze, qui nous présente un beau message pour l'universalité de la paix dans le monde. Un travail particulièrement soigné et approfondi pour parler de l'amour. Elle expose ce travail dans le hall d'entrée d'un vieux palais vénitien, le palais Pisani, et nous a séduit par sa force et sa simplicité...On a aimé.




Ainsi se termine ce regard sur une Venise qui sait admirablement marier sa splendeur classique et son insolite vie quotidienne des cannotiers avec l'art contemporain de tous les horizons ...SANS VOUS NOYER!


Texte et photographie de Morgan & Laurence Louisfert

dimanche 6 novembre 2011

DAVID SMITH OU LA DISSOLUTION DU SENS

Voici  mes dernières impressions sur une grande oeuvre qui viennent largement déstabiliser mes a priori esthétiques franchement accusateurs sur le travail de David Smith...

Le sacerdoce de la sculpture de ce géant du métal me donne du fil à retordre! Un bel enseignement de la persévérance....

Dans le feu de la passion, le sculpteur ne voit que sa production, sans se laisser distraire par tous ces flux externes de la société qui diluent si facilement une oeuvre artistique. Cette force, cette obstination d'un précurseur de la sculpture en métal me laisse admiratif. Inflexible. "Si vous me demandez pourquoi je fais de la sculpture, je dois répondre que c'est mon mode de vie, mon équilibre et ce qui justifie mon existence."

Il crée dans l’impulsion tout en sachant écouter les forces du dessin. Son oeuvre est un grand hommage à la liberté. Les formes dévergondées de ses pièces et son indépendance anti-intellectualiste se fichent de toutes les conventions.

"L'art n'est pas dissocié de la vie. Il est dialectique. Il évolue en permanence et se rebelle contre le passé. Il existe dans l'esprit des hommes libres depuis moins d'un siècle. Auparavant, l'art suivait une direction imposée par d'autres esprits que celui de l'artiste dans un but d'exploitation et d'utilisation commerciale. La liberté pour l'esprit de l'homme de célébrer ses propres sentiments par une oeuvre d'art va de pair avec la révolte sociale contre l'asservissement. Je crois que l'art reste à créer et qu'il en va de même pour la liberté et l'égalité."

David Smith est l'incarnation du combat avec la réalité: Si les sculptures sont abstraites, l'homme est avant tout un ouvrier qui ne perd jamais le sens des réalités sociales de son époque. Une sculpture en métal est réelle; elle existe avant tout par elle même et par le besoin de l'artiste de la créer.



"L'art se passe de mots."

Le livre qui m'inspire ce message "Ecrits et discours" de David Smith  (ed. Beaux-arts de Paris coll. écrits d'artistes) est une mine de renseignements et de stimulations pour tout être compulsif de la sculpture. "Le questionnaire à l'intention des élèves" est une précieuse boussole...

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samedi 21 mai 2011

LE MONDE MODERNE

"L'insignifiance croissante du monde moderne" Annah Harendt

jeudi 17 mars 2011

FONDATION DUBUFFET

Une remise à zéro de la réalité. doutons de la réalité puisqu'elle n'est jamais une et une seule. Mieux vaut-il adapter la réalité à sa propre pensée, faire "des prothèses de la réalité". Un retour à zéro, à l'origine, aux premières émotions. Éradication totale d'un passé culturel. ? Nous sommes en plein dans l'art brut. Une transe méditative qui hisse l'art à l'honnêteté suprême. Une émotion pure. Sans soucis de beauté, sans besoin de plaire. Pourquoi l'art doit-il plaire? Non il doit faire vibrer.






C'est avec les arts plastiques que l'on arrive mieux à exprimer une vision, une intuition philosophique car on passe outre le langage. Seulement l'obstacle à a communication est grand! Incompris?



Et très fort Dubuffet, car dans cette anarchie calligraphique, cette intense liberté de l'acte créatif il reste une cohérence, celle d'une vie de recherche artistique dans laquelle on suit un fil (comme le fil emmêlé de ses dessins), une unité, un bloc stylistique. Même ses sculptures suivent le rythme de ses peintures! (très important le rythme) L'art devient un moyen et non fin !



Dubuffet un philosophe plus qu'un artiste...

BALROZACDIN

Boulevard Raspail, Balzac au milieu du trafic, une sacrée stature. Camouflé dans les arbres, enmitoufflé dans un grand manteau, tu ressembles à un montagne, un mufle géant qui nous regarde du passé. Incliné près à tomber limité vacillant ou hébété, la cloche de la sculpture quoi!




Cette oeuvre est révolutionnaire. On oublie les canons classiques de la représentation du corps; c'est la sculpture dans la masse dans toute sa splendeur. Un monument plein de force, digne de ce géant de la littérature qui observe la société chaque jour au croisement de Montparnasse. Paradoxe de l'art on décèle un entêtement et une résignation: L'obstination de la figure qui reste planté là et la déconfiture de cet être maintenant anachronique et décalé comme offusqué par notre temps, il est vert, en bronze, inamovible. Témoin de nos moeurs, contemples nos morts.


Fort.

lundi 14 mars 2011

HENRY MOORE

Elles sont sensuelles lascives oui mais ce n'est pas leur originalité car elles sont curieusement empreintes d'une extraordinaire inertie alors même qu'elles aspirent à une suprême élévation de leur corps une lutte permanente pour se rendre légère et nous séduire elles sont avant toute terriennes telluriques elles nous garantissent la stabilité elles sont les gardiennes du foyer un grand paradoxe entre la terre et l'air entre leur nature et leur rêve qui se dégage par ses forces sensuelles articulées entre le plein et le creux elles sont en même temps songeuses figées extatiques ce sot ici des poseuses imposantes qui nous attirent comme des montagnes des contrées sinueuses où l'on voudrait se perdre et voyager et dans cette gestation ressort aussi la maternité l'oeuf le besoin de protection le refuge la sculpture refuge d'où la pierre

mardi 18 janvier 2011

BEL ASTRE VOYAGEUR

Bel astre voyageur

À La Comète de 1861

Bel astre voyageur, hôte qui nous arrives
Des profondeurs du ciel et qu’on n’attendait pas,
Où vas-tu ? Quel dessein pousse vers nous tes pas ?
Toi qui vogues au large en cette mer sans rives,
Sur ta route, aussi loin que ton regard atteint,
N’as-tu vu comme ici que douleurs et misères ?
Dans ces mondes épars, dis ! avons-nous des frères ?
T’ont-ils chargé pour nous de leur salut lointain ?

Ah ! quand tu reviendras, peut-être de la terre
L’homme aura disparu. Du fond de ce séjour
Si son œil ne doit pas contempler ton retour,
Si ce globe épuisé s’est éteint solitaire,
Dans l’espace infini poursuivant ton chemin,
Du moins jette au passage, astre errant et rapide,
Un regard de pitié sur le théâtre vide
De tant de maux soufferts et du labeur humain.

Louise Ackermann, Poésies Philosophiques